Maîtres et esclaves de Paul Greveillac

Maitres et esclaves de Paul Greveillac

Résumé de l’éditeur : Kewei naît en 1950 dans une famille de paysans chinois, au pied de l’Himalaya. Au marché de Ya’an, sur les sentes ombragées du Sichuan, aux champs et même à l’école, Kewei, en dépit des suppliques de sa mère, dessine du matin au soir. La collectivisation des terres bat son plein et la famine décime bientôt le village. Repéré par un garde rouge, Kewei échappe au travail agricole et à la rééducation permanente. Sa vie bascule. Il part étudier aux Beaux-Arts de Pékin, laissant derrière lui sa mère, sa toute jeune épouse, leur fils et un village dont les traditions ancestrales sont en train de disparaître sous les coups de boutoir de la Révolution. Dans la grande ville, Kewei côtoie les maîtres de la nouvelle Chine. Il obtient la carte du Parti. Devenu peintre du régime, il connaît une ascension sans limite. Mais l’Histoire va bientôt le rattraper.

Quels sont les rouages de la manipulation de masse entre les murs d’une nation dictatoriale? C’est la question à laquelle répond Paul Gréveillac avec son roman. Avec force détails, l’auteur dépeint une fresque historique plus vraie que nature de la Chine des années 50 jusqu’à nos jours. Une propagande bien huilée est en place grâce au recrutement de peintres formatés et d’une culture de la retouche de tableau. Nous sommes témoins de la compétition féroce entre les grands dignitaires du régime, tous les coups sont permis pour évincer son concurrent. L’écrivain développe également les grands évènements de la République populaire de Chine comme la collectivisation forcée, la révolution culturelle, la mort de Mao Zedong en 1976 et les rébellions réprimées dans le sang place Tian’anmen.

Kewei est l’un des peintres dévoués tout entier aux ambitions du régime. Nous le suivons dès sa naissance dans un village du Sichuan. Son enfance est faite d’une relative liberté. Cependant, même les zones les plus reculées sont vite mises au pas du communisme et du Petit livre rouge (recueil dogmatique). Petit à petit, son regard change et sa pensée évolue pour se conformer aux attentes de l’administration chinoise qui n’hésite pas à user de la manipulation, la persuasion ou encore la force. Nous suivons son parcours à l’école des beaux-arts jusqu’à ses divers emplois au bureau de la propagande. Les personnages féminins sont également très marquants et édifiants. Seul bémol : quelques longueurs sont venues gênées ma lecture sur la fin. La chute est déchirante et a su me les faire oublier.

Paul Greveillac signe un roman passionnant. Le travail de recherche est impressionnant tout comme l’ampleur de ce récit. J’ai beaucoup appris à propos de la Chine contemporaine. Maîtres et esclaves est une fresque réaliste et édifiante où l’idéologie et la propagande engloutissent un pays entier. Il est aussi question de transmission. Les quelques longueurs sur la fin n’auront pas eu raison de mon enthousiasme.

Lu dans le cadre du Grand prix des lectrices Elle 2019.

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Fanny

4 bandes dessinées, 3 avis, 1 billet

    

Culottées, Tome 1 et 2 de Pénélope Bagieu

Avec beaucoup de talent, Pénélope Bagieu nous propose de découvrir plusieurs portraits de femmes souvent oubliées par l’Histoire ayant suivi leur passion, bravé les interdictions et les convenances ou encore défendu des causes. Des destins plus ou moins heureux mais qui montrent qu’aucune barrière ne peut arrêter une femme dans son ascension. Vous l’aurez compris, ces deux bandes dessinées ont une véritable portée féministe. Pour ne rien gâcher l’ensemble est coloré et bien mené. Le schéma est toujours le même : une double-page blanche annonce le nom de la personnalité traitée suivie de plusieurs planches racontant sa vie. Chaque chapitre se termine par une superbe double page dessinée. Ces deux tomes sont très variés et évitent tout à fait la monotonie. Chaque femme à son univers bien à elle et c’est un plaisir à découvrir!

Agatha, la vraie vie d’Agatha Christie de Anne Martinetti, Guillaume Lebeau et Alexandre Franc

Cette bande dessinée commence sur les chapeaux de roue avec un évènement bien connue de la biographie d’Agatha Christie : sa disparition. Ensuite, nous suivons chronologiquement la vie de la Reine du crime avec tout de même quelques flashbacks qui permettent de donner un bon rythme à l’ensemble. Le récit tient donc la route et nous présente une femme moderne et indépendante. J’ai appris beaucoup d’éléments la concernant. Les dessins sont assez simples mais dotés d’un certain charme, colorés et agréables à regarder. Hercule Poirot (mais aussi Miss Marple dans une moindre mesure) s’évertue à titiller sa créatrice à l’image d’un petit diable sur une épaule. C’est assez drôle et surprenant. Une belle bande dessinée que je suis ravie d’avoir dans ma bibliothèque. C’est aussi un bel hommage à une autrice britannique majeure!

Mars Horizon de Florence Porcel et Erwan Surcouf

Je me passionne de plus en plus pour l’astronomie. Je suis Florence Porcel depuis quelques temps déjà. Ici, nous accompagnons plusieurs astronautes dans leur participation à un programme d’installation d’une communauté sur Mars. Il  y a beaucoup de rebondissements couplés à des passages d’émotion ou de stress intense. A mon sens, quelques longueurs auraient pu être évitées. Mis à part cela, cette bande dessinée est d’une bonne facture. Certes elle prend quelques libertés mais le cheminement est respecté et plusieurs notions sont expliquées. Je vous invite à regarder la série en 6 épisodes Mars pour découvrir ce qui est réellement prévu pour la colonisation de Mars. J’ai beaucoup aimé les références en tout genre notamment à The Big Bang Theory (t-shirt « Bazinga! »), à Retour vers le futur (le rover porte le nom de Delorean), à Star Wars (un écran enregistreur s’appelle O.Biwan) ou encore à l’astronaute Jean-François Clervois (l’héroïne s’appelle Jeanne Clervois) entre autres. On retrouve toute l’excitation et l’enthousiasme que Florence Porcel nourrit pour cette planète et ça c’est magique!

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Fanny

La terre qui penche de Carole Martinez / Rentrée littéraire 2015

003518071Résumé de l’éditeur : Blanche est morte en 1361 à l’âge de douze ans, mais elle a tant vieilli par-delà la mort! La vieille âme qu’elle est devenue aurait tout oublié de sa courte existence si la petite fille qu’elle a été ne la hantait pas. Vieille âme et petite fille partagent la même tombe et leurs récits alternent. L’enfance se raconte au présent et la vieillesse s’émerveille, s’étonne, se revoit vêtue des plus beaux habits qui soient et conduite par son père dans la forêt sans savoir ce qui l’y attend. Veut-on l’offrir au diable filou pour que les temps de misère cessent, que les récoltes ne pourrissent plus et que le mal noir qui a emporté sa mère en même temps que la moitié du monde ne revienne jamais?

Plusieurs fois, on m’a conseillé de lire Carole Martinez. C’est Kheira qui m’a définitivement donné envie de découvrir cet auteur. Lorsque j’ai vu ce titre dans la liste des matchs de la Rentrée Littéraire Priceminister, je n’ai pas hésité une seule seconde. Après lecture, je peux dire que c’est une belle surprise. C’est un roman unique en son genre où l’auteur instille un vrai style ainsi qu’un univers propre. Il s’agit d’un récit d’une grande sensibilité. L’écriture est très belle comme finement ciselée et à fleur de peau. Les sentiments ne sont pas forcément directement dits mais souvent suggérés. Ceci apporte une subtile force ainsi qu’une vraie profondeur à l’ensemble.

L’Histoire n’est pas en reste. Carole Martinez nous propose une plongée en 1361 sur les bords de la Loue. C’est tout un mode de vie qui nous est présenté mais aussi la place de l’enfant dans la société. Le contexte historique n’est pas forcément ce qui est le plus détaillé mais il est suffisant pour servir le roman et ne pas masqué les messages que l’auteur souhaite faire passer. Blanche ainsi que son double plus âgé sont attachantes. Le chemin de l’alphabétisation n’est pas facile pour elle. Elle doit vite être autonome et se prendre en main. La chute est intéressante et scelle ce roman d’une belle manière. Le surnaturel n’est jamais loin sous forme de fantasmagorie. Il rythme la vie de la jeune fille.

C’est donc une belle surprise. En lisant ce roman j’ai eu l’impression d’entrer dans un véritable univers, celui de Carole Martinez. C’est original et magnifiquement écrit. Du domaine des murmures m’attend gentiment dans ma pile à lire. J’espère le découvrir prochainement.

Lu dans le cadre des matchs de la rentrée littéraire 2015 de Priceminister.

Lu en lecture commune avec Kheira et Fanny.

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Fanny

Chez les heureux du monde d’Edith Wharton

20141217_110452Résumé : Orpheline ruinée, Lily Bart cherche à faire un riche mariage, bien qu’elle aime un avocat, Lawrence Selden. Trop honnête pour se vendre, mais d’allure trop libre pour garder sa réputation intacte, elle se voit fermer les portes de la haute société… Avec un art digne de son maître Henry James, Edith Wharton peint la haute société new-yorkaise, son éclat et sa richesse, mais aussi sa profonde corruption.

C’est d’abord Eliza, du blog Passion Lectures & co, qui m’a donné envie de lire ce livre. Ses avis élogieux à propos des romans d’Edith Wharton puis une lecture commune organisée sur le forum Whoopsy Daisy m’ont convaincu de me lancer. J’ai très bien fait car j’ai passé un excellent moment de lecture qui m’a fait ressentir plein de sentiments différents. En effet, l’héroïne, Lily Bart, est un personnage qui évolue selon ses déconvenues ou ses succès. Notre regard sur elle change à fur et à mesure de ces évènements. J’ai tantôt eu de l’empathie pour elle et tantôt de l’agacement car je n’ai pas toujours été d’accord avec ses choix. Lily prend beaucoup de risques le plus souvent inconsidérés. Les personnages secondaires sont très présents, bien décrits et prennent une part importante dans l’histoire. J’ai su apprécié Selden qui apparait dès le début du roman.

Edith Wharton possède une plume d’une finesse incroyable. Son écriture est expressive et détaillée. Le lecteur a l’impression de faire partie de chaque scène! On s’y croit totalement. La mise en place de son récit n’est pas en reste puisque dès la scène d’ouverture l’auteure nous plonge dans l’ambiance du New-York du début du XXe siècle. L’histoire débute dans une gare. C’est déjà tout un symbole qui augure des choix et des chemins futurs à prendre. L’auteure nous dépeint la haute classe new-yorkaise sans concession avec toute la malveillance et la manipulation de certains de ses membres. Les classes laborieuses nous sont aussi décrites. L’ensemble est donc passionnant. La fin nous ouvre les yeux sur beaucoup de points. Elle est menée d’une main de maitre et m’a ému et marqué.

Comme vous l’aurez compris, j’ai été conquise par ce premier roman que j’ai lu d’Edith Wharton. Cette dernière a su m’entrainer dans le New-York du début du XXe sicèle et me tenir en haleine quant à l’histoire de Lily. Le destin de cette dernière me marquera c’est certain. Je pense voir l’adaptation cinématographique avec Gillian Anderson dans les jours à venir.

Fanny