Résumé de l’éditeur :« Les mots des autres m’ont nourrie, portée, infusé leur énergie et leurs émotions. Jusqu’à la mort de mon frère, le 14 octobre 2015 à Montréal, je ne voyais pas la nécessité d’écrire. Le suicide d’Alex m’a transpercée de chagrin, m’a mise aussi dans une colère folle. Parce qu’un suicide, c’est la double peine, la violence de la disparition génère un silence gêné qui prend toute la place, empêchant même de se souvenir des jours heureux. Moi, je ne voulais pas me taire. Alex était un être flamboyant, il a eu une existence belle, pleine, passionnante, aimante et aimée. Il s’est battu contre la mélancolie, elle a gagné. Raconter son courage, dire le bonheur que j’ai eu de l’avoir comme frère, m’a semblé vital. Je ne voulais ni faire mon deuil ni céder à la désolation. Je désirais inventer une manière joyeuse d’être triste. Les morts peuvent nous rendre plus libres, plus vivants. »
Qu’est-ce qui pousse un homme brillant, drôle et entouré à mettre fin à ses jours? C’est la question à laquelle tente de répondre Olivia de Lamberterie dans son tout premier livre, véritable linceul pour son petit-frère Alexandre. Je vous préviens tout de suite, cet ouvrage est un coup de cœur. J’ai tourné chaque page avec cette impression de retenir ma respiration, comme en apnée. Ce livre touche à une peur qu’on porte tous en nous : la perte. Paradoxalement, le sujet est difficile mais j’ai eu bien du mal à quitter Olivia et Alexandre. Nous apprenons à les connaître : leur enfance, leur complicité, leur parcours, leur part d’ombre.
Ce livre est écrit sur le vif, en témoigne la spontanéité qui se dégage de chaque phrase. Avec sa plume franche, Olivia de Lamberterie fait revivre son petit frère. Elle donne ainsi un pouvoir unique à chaque lecteur : redonner à leur tour une nouvelle existence à Alex. Face à son chagrin, l’écrivaine a décidé d’«inventer une manière joyeuse d’être triste ». Plusieurs passages sont donc très drôles grâce à des anecdotes, des situations improbables ou des expressions. C’est aussi le combat contre la noirceur qui s’installe inéluctablement. La psychiatrie n’en est finalement qu’à ses balbutiements et les diagnostics sont bien difficiles à poser.
Olivia dépose tout ce qu’elle a sur le cœur entre les pages de son livre. Elle ne tente pas de repousser à tout prix son chagrin mais plutôt de vivre avec et de faire au mieux. Cette idée a fait écho en moi. Ce livre est déchirant, percutant, édifiant sur bien des élèments mais aussi joyeux par moment. C’est une pépite à l’état brut, clairvoyante et si vraie. Je ne peux que vous conseiller de faite revivre Alex à votre tour en lisant les mots d’Olivia de Lamberterie.
Résumé de l’éditeur :L’évidence n’est pas toujours la vérité. Manfred Baumann est un solitaire. Timide, inadapté, secret, il passe ses soirées à boire seul, en observant Adèle Bedeau, la jolie serveuse du bar de cette petite ville alsacienne très ordinaire. Georges Gorski est un policier qui se confond avec la grisaille de la ville. S’il a eu de l’ambition, celle-ci s’est envolée il y a bien longtemps. Peut-être le jour où il a échoué à résoudre une de ses toutes premières enquêtes criminelles, qui depuis ne cesse de l’obséder. Lorsque Adèle disparaît, Baumann devient le principal suspect de Gorski. Un étrange jeu se met alors en place entre les deux hommes. Une affaire en apparence banale, des vies, une ville, qui le sont tout autant… Graeme Macrae Burnet nous démontre ici avec une incroyable virtuosité que la banalité n’existe pas : elle est la couverture de l’inattendu. À la façon des grands maîtres du noir, de Simenon à Chabrol, il transfigure avec un incroyable talent l’histoire de ses deux héros, paralysés par un passé mystérieux, dont la délivrance réserve bien des surprises.
Comme vous l’aurez sûrement remarqué, le polar n’est pas très présent sur le blog. Et pour cause, c’est un genre littéraire que j’explore assez peu. Le Grand prix des lectrices Elle 2019 me donne donc l’occasion de le découvrir davantage. Ce roman d’un auteur écossais prend place en Alsace, c’est déjà suffisamment improbable pour éveiller ma curiosité. Saint-Louis est une commune moyenne et morne comme il en existe des milliers en France. L’atmosphère de ces endroits est assez bien retranscrite entre les bars, les petites boutiques, les quartiers résidentiels et les racontars. Les jours de ces années 80 semblent s’écouler lentement, tous identiques.
Le rythme est plutôt lent. Graeme Macrae Burnet prend son temps et nous détaille le passé obscur des deux protagonistes principaux. D’un coté, Gorski, un inspecteur freiné et hanté par une affaire de ses débuts. De l’autre, Manfred, un homme au lourd passé et à l’imagination débordante mais surtout adepte de petits mensonges qui vont vite lui jouer des tours. Je n’ai pas ressenti de grosse surprise avec cette intrigue. La chute est saisissante mais également assez prévisible. Ce roman est clairement un hommage à Simenon et à son célèbre héros Maigret ainsi qu’au cinéma de Claude Chabrol. Dès la préface, le ton est donné.
Je n’ai pas été surprise par les différentes révélations et la chute. Par contre, ce roman aux personnages intrigants, à l’atmosphère soignée et au contexte général réaliste m’a tout de même fait passer un bon moment de lecture. L’ambiance à l’ancienne des années 80 y est excellente. Je surveillerais sûrement les prochaines parutions de Graeme Macrae Burnet.
Lu dans le cadre du Grand prix des lectrices Elle 2019.
Résumé de l’éditeur :Au début des années 1920, le comte Alexandre Illitch Rostov, aristocrate impénitent, est condamné par un tribunal bolchévique à vivre en résidence surveillée dans le luxueux hôtel Metropol de Moscou, où le comte a ses habitudes, à quelques encablures du Kremlin. Acceptant joyeusement son sort, le comte Rostov hante les couloirs, salons feutrés, restaurants et salles de réception de l’hôtel, et noue des liens avec le personnel de sa prison dorée – officiant bientôt comme serveur au prestigieux restaurant Boyarski –, des diplomates étrangers de passage – dont le comte sait obtenir les confidences à force de charme, d’esprit, et de vodka –, une belle actrice inaccessible – ou presque –, et côtoie les nouveaux maîtres de la Russie. Mais, plus que toute autre, c’est sa rencontre avec Nina, une fillette de neuf ans, qui bouleverse le cours de sa vie bien réglée au Metropol. Trois décennies durant, le comte vit nombre d’aventures retranché derrière les grandes baies vitrées du Metropol, microcosme où se rejouent les bouleversements la Russie soviétique.
Un gentleman à Moscou est un roman étonnant. Ici, pas de rythme haletant, pas de révélation inattendue ni de tension insoutenable. Amor Towles nous propose de suivre pendant trente deux ans un aristocrate russe assigné à résidence au Metropol, hôtel en plein cœur de Moscou. Après cette condamnation par le tout nouveau régime bolchévique, notre gentleman fait contre mauvaise fortune bon cœur. Ce roman est donc avant tout un personnage. Alexandre Rostov possède des manières impeccables et l’allure d’un dandy. Les informations le concernant nous sont apportées au compte goutte. La plume d’Amor Towles m’a beaucoup plu. Elle est descriptive et empreinte d’un humour pince-sans-rire délicieux.
Le romancier nous entraîne dans une lente déambulation au sein du Metropol que nous finissons par connaitre comme notre poche. Entre suites luxueuses, restaurants huppés et sous-sols contenant les coulisses de cette grosse machine, c’est une micro-société qui nous est donnée à voir. Les personnages secondaires sont hauts en couleur et attachants. Ce roman dégage un charme suranné dans une époque où les codes de l’aristocratie sont proscrits et semblent obsolètes. Le contexte historique est présent par petites touches, de la révolution d’Octobre à Nikita Khrouchtchev. Toutes les références à la littérature et à la poésie russes sont un régal. Elles donnent envie de découvrir et redécouvrir Tolstoï, Dostoïevski ou encore Tourgueniev.
Ce roman est loin de faire l’unanimité, je lui ai pourtant trouvé un certain charme. J’ai appris à connaitre Alexandre Rostov et ce fut bien difficile de le quitter. Son caractère, son charisme, son intelligence m’ont marquée. Les personnages secondaires sont tout aussi présents et attachants : Nina, Sofia, Andreï, Marina et les autres. Les références littéraires et historiques sont également très intéressantes et donnent envie d’aller plus loin. Une très bonne lecture.
Lu dans le cadre du Grand prix des lectrices Elle 2019.
Les Presses de la cité m’ont contactée afin d’interviewer Lyliane Mosca lors du salon littéraire Le livre sur la place à Nancy. C’est avec un grand plaisir que j’ai accepté cette entrevue. J’ai donc retrouvé l’écrivaine et Lætitia, l’attachée de presse de la collection Terres de France des Presses de la cité, le 8 septembre autour d’un verre sur la très belle place Stanislas. La romancière nous parle de son dernier roman : La vie rêvée de Gabrielle. Vous pouvez retrouver mon avis en cliquant ici. J’espère que cet échange vous intéressera et que vous souhaiterez ensuite vous pencher sur ce roman.
1. Pouvez-vous nous présenter votre parcours. Comment en êtes-vous venue à écrire ?
J’ai toujours eu envie d’écrire, depuis ma plus tendre enfance. Ensuite, j’ai fait autre chose, notamment du secrétariat. J’ai été licenciée de mon entreprise. Finalement, ce fut une opportunité puisque je suis rentrée dans un journal comme pigiste puis embauchée dans ce même journal. C’est le hasard mais j’avais toujours l’idée d’écrire en tête, cette envie. Quand j’ai été en retraite, mon rédacteur en chef m’a proposé de garder la page littéraire du dimanche de l’Est Éclair que nous avions créé. Je me suis dis que c’était peut-être le moment, j’ai donc commencé à écrire. J’ai eu de la chance, mon premier manuscrit, Les gens de Laborde, a été pris aux éditions De Borée. J’ai ensuite écrit sept romans au sein de la même maison d’édition. J’ai suivi Clarisse Enaudeau, d’abord directrice éditoriale chez De Borée puis éditrice de la collection Terres de France aux Presses de la cité. Mon rêve était d’être publié chez cet éditeur.
J’ai toujours aimé les impressionnistes. J’aime Renoir en particulier même si ce n’est pas le seul. Il se trouve qu’il avait une maison dans le département où j’habite. Là-bas, ils ont tout exploité. Ils ont fait une maison Renoir, un centre Renoir. Il venait en vacances à Essoyes, on connaît donc bien son histoire. Il a beaucoup peint le village. Par exemple, Les laveuses a été peint à Essoyes. Cela m’a permis de réapprendre des éléments sur l’artiste. Comme Gabrielle Renard est un personnage de mon département, je trouvais cela également sympathique de la mettre en lumière.
3. Écrire un roman historique nécessite un travail de recherche important, quelles sont les sources sur lesquelles vous vous êtes appuyée?
Je me suis appuyée sur la biographie du petit-neveu de Gabrielle Renard, Bernard Pharisien, qui est encore en vie. C’est un ancien enseignant, il est aussi historien. Il s’est penché sur l’histoire de cette grand-tante. Ils en parlaient beaucoup dans la famille étant donné la vie particulière qu’elle a eu, partie d’un petit village de Champagne. J’ai eu beaucoup de renseignements et d’anecdotes aussi. Cela m’a permis de construire mon personnage au plus près de la réalité. J’ai également lu le livre de Jean Renoir, Pierre-Auguste Renoir, mon père.
4. Gabrielle Renard est un personnage fort et charismatique. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre héroïne?
Dans le village d’Essoyes, tout le monde connaît son histoire. Elle choquait beaucoup par sa liberté et d’avoir poser pour un artiste. Ce n’était pas facile mais elle avait un tempérament volontaire et elle se moquait du qu’en-dira-t-on. Elle a mené la vie qu’elle a voulu. Elle a toujours gardé son franc-parler, son authenticité. Cela plaisait à tout le monde, aux artistes qui venaient. Elle leur faisait ses spécialités culinaires. Elle descendait en costume poser. Par contre, cela déplaisait à Madame Renoir qui en était un peu jalouse. Elle se chamaillait avec Pierre-Auguste de temps en temps mais ils avaient une complicité. Le mystère plane toujours sur la nature de celle-ci. Des réponses sont apportées par rapport à Jean même si en réalité nous n’en savons rien. Gabrielle a beaucoup materné Jean et ce dernier a beaucoup idéalisé Gabrielle. En fait, leur relation est plutôt plausible. On entre aussi dans les secrets de Renoir. Il a eu deux enfants cachés, Jeanne à qui il a laissé une rente et Jean.
Les laveuses (vers 1912)
5. Dans ce roman, vous redonnez vie à des personnages ayant réellement vécus. Est-ce que cela ne vous a pas posé de difficulté?
Cela a été délicat au début car je n’avais jamais fait cet exercice, mais j’ai pensé que ce serait plus difficile. J’ai réinventé Gabrielle comme s’il s’agissait d’une connaissance. Je me suis tellement mise dans sa peau que je me sentais Gabrielle. J’ai tout vécu à ses côtés. Les sentiments que je lui prête sont assez justes je pense même si je me suis sûrement trompée sur certains points. Bernard Pharisien a lu le livre. J’avais le trac en lui laissant. A part quelques petits détails, il a adoré.
6. Il est beaucoup question du vieillissement de Pierre-Auguste Renoir. Il continue à peindre, à produire et à vendre énormément malgré son déclin physique. Quelle a été la corrélation entre sa production artistique et son vieillissement?
C’était terrible pour lui. C’est sa peinture qui l’a fait tenir aussi longtemps. On lui attachait les pinceaux sur les mains pour qu’il puisse peindre. On le poussait en chaise roulante. C’était très pénible. Sa peinture, c’était sa lumière. C’était ce but qui lui donnait le tonus pour vivre encore. Sans elle, il n’aurait plus rien. Sa femme est décédée, Gabrielle et ses enfants sont partis (et ont été blessés à la guerre). Sa peinture le maintient debout. Il est resté très simple tout en vendant très bien et très cher.
7. Pouvez-vous nous dévoiler vos habitudes d’écriture?
J’écris au calme l’après-midi en compagnie de mon chien et mon chat. Mes animaux sont tranquilles car ils savent que j’en ai pour un moment et que je ne vais pas m’en aller. Ils apportent des ondes positives. Ils me font du bien. J’écris régulièrement. C’est un moment que j’aime, c’est un moment magique. Je ne prends jamais de rendez-vous l’après-midi ou alors vraiment quand je n’ai pas le choix. Quand je suis absente, j’ai hâte de retrouver mon roman en cours. Les gens sont parfois étonnés de voir que je travaille encore.
Il m’arrive d’avoir des petits carnets quand il me vient des idées. Parfois, elles me viennent quand je ne m’endors pas bien. J’ai donc toujours un carnet près de mon lit. J’aime écrire des histoires compliquées où on s’interroge jusqu’à la fin. Je suis quelques fois un peu emmêlée dans mon scenario. Le nœud se démêle le soir ou le matin.
8. Quels sont vos futurs projets?
Le prochain roman sera très contemporain, je pense d’ailleurs rester dans ce genre dorénavant. Il ne sortira pas avant 2020 ou 2021. En réalité, j’ai un roman d’avance qui va paraître en 2019. La promesse du Bois-Joli est sorti en avant-première chez France Loisirs, il sera publié à nouveau aux Presses de la cité en 2019. C’est l’histoire d’une jeune fille qui vit avec sa grand mère, propriétaire d’une boulangerie qui périclite. Elle n’est pas très heureuse. Elle fait la rencontre de quelqu’un d’un peu plus âgé. Elle l’aime mais il a un secret. Il y a un coté un peu ésotérique. Elle est musicienne mais elle n’arrive pas à composer. Un jour, elle découvre une photo d’un des fusillés de la Seconde Guerre mondiale de Creney-près-Troyes, près de chez moi, et un contact s’établit entre eux. 53 fusillés, 53 érables plantés et 53 photos, c’est un très beau lieu de souvenir.
9. Pouvez-vous nous citer quelques romans qui vous ont marquée ?
Quand j’étais plus jeune, j’ai aimé lire Anna Karenine, Madame Bovary, les romans d’Henri Troyat, de la comtesse de Ségur, d’Alphonse Daudet, de la bibliothèque rose et de la bibliothèque verte. Un livre récent que j’ai beaucoup aimé : Changer l’eau des fleurs de Valérie Perrin. J’ai aimé le ton, le sujet ainsi que l’écriture. Yasmina Khadra, Éric-Emmanuel Schmitt, Didier van Cauwelaert et Philippe Besson sont aussi des auteurs que j’apprécie. Ce dernier m’avait d’ailleurs très bien préfacé l’un de mes livres, Une femme en mauve. C’est un roman choral à trois voix assez intimiste, il y a beaucoup de moi dedans.
Merci Lyliane Mosca de m’avoir accordé du temps, ainsi qu’à Lætitia pour cette belle proposition.
Résumé de l’éditeur :« Tu étais libre et sauvage. D’une beauté à couper le souffle. Tu n’étais plus une enfant, pas encore une adulte quand tu enflammas la pellicule du Dernier Tango à Paris, un huis clos de sexe et de violence avec Marlon Brando. Tu étais ma cousine. J’étais une petite fille et tu étais célèbre. Tu avais eu plusieurs vies déjà et de premières fêlures. Tu avais quitté ta mère à quinze ans pour venir vivre chez mes parents. Ce Tango marquait le début d’une grande carrière, voulais-tu croire. Il fut le linceul de tes rêves. Tu n’étais préparée à rien, ni à la gloire, ni au scandale. Tu as continué à tourner, mais la douleur s’est installée. Cette histoire, nous nous étions dit que nous l’écririons ensemble. Tu es partie et je m’y suis attelée seule, avec mes souvenirs, mes songes et les traces que tu as laissées derrière toi. Ce livre parle beaucoup de toi et un peu de moi. De cinéma, de politique, des années soixante-dix, de notre famille de fous, de drogue et de suicide, de fêtes et de rires éclatants aussi. Il nous embarque à Londres, à Paris, en Californie, à New York et au Brésil. On y croise les nôtres et ceux qui ont compté, Alain Delon, Brigitte Bardot, Patti Smith, Marlon Brandon, Nan Goldin… Ce livre est pour toi, Maria. Je ne sais pas si c’est le récit que tu aurais souhaité, mais c’est le roman que j’ai voulu écrire ».
Pour commencer, je dois bien avouer que Maria Schneider m’était totalement inconnue. J’ouvre donc ce livre et je découvre. Je découvre une jeune femme dépassée par le scandale d’un film dont elle partage l’affiche avec Marlon Brando, Le dernier tango à Paris. Ce dernier la poursuivra toute sa vie. Se dessinent aussi l’enfer de la drogue, de la dépression, de l’aigreur parfois et du rouleau-compresseur de la grosse machine du cinéma. Une vie faite de désillusion, de déchéance mais aussi de rares joies et d’envies. L’écrivaine utilise son livre comme medium pour entamer une conversation avec Maria. Elle emploie le tutoiement de la première à la dernière page. Vanessa Schneider nous propose un portrait sans concession de sa célèbre cousine. Elle la décrit comme une grande sœur dont l’écart d’âge important lui confère une aura mystérieuse, un peu floue mais provoque une fascination chez la jeune fille puis une véritable obsession.
Vanessa Schneider nous livre sa vérité. Sa colère est clairement présente, contre le réalisateur du Dernier tango à Paris, contre les personnes ayant laissées tomber Maria au fil des ans, contre les secrets des plateaux de tournage, contre le manque de tact et de respect des médias. Cependant, derrière le portrait de l’actrice, il est aussi question du parcours de Vanessa, de son enfance dans une famille hors du commun dans les années 80, de son adolescence puis de sa complicité d’adulte avec Maria. Il est dommage qu’une fois la dernière page du livre tournée, l’impression du souhait absolu de Vanessa Schneider d’une réhabilitation à tout prix prenne beaucoup de place. Il manque la voix et l’opinion de Maria que j’aurais beaucoup aimé lire. Elle en aurait eu des choses à nous raconter, mais elle n’aura jamais eu l’occasion de s’exprimer réellement. Ceci me laisse un goût un peu amer lorsque je repense à elle.
Vanessa Schneider nous livre le récit intime de l’existence éprouvante de Maria Schneider. La sincérité et la tendresse qui transparaissent de ces pages sont touchantes. Une certaine colère est également présente tout comme l’envie d’une réhabilitation. Cette dernière est louable puisqu’elle redonne une voix à Maria, mais elle est peut-être un peu trop prégnante dans certains passages.
Lu dans le cadre du Grand prix des lectrices Elle 2019.
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Le weekend dernier, je me suis rendue au salon Le livre sur la place à Nancy. Premier salon de la rentrée littéraire, c’est l’occasion de rencontrer des écrivains très connus mais aussi de faire de jolies découvertes un peu plus discrètes. Comme tous les ans, je suis allée écouter des entretiens, des tables rondes et surtout dialoguer avec des écrivains. Je ne ressens pas le besoin de rencontrer absolument les auteurs que je lis mais j’aime aller les voir lorsque l’occasion se présente. J’ai donc pu discuter avec Joann Sfar, Jerôme Attal, Vanessa Schneider, Olivia de Lamberterie, Marie-Aude Murail, Lyliane Mosca et Nina Bouraoui. C’est souvent avec une certaine fébrilité que je m’approche d’eux, leur écoute, leur gentillesse et leur bienveillance ont tôt fait de faire fondre mes craintes. Dans ces moments, je ressens toujours beaucoup d’émotions, de reconnaissance ainsi que le sentiment exaltant de vivre aussi fort ces instants hors du temps.
Achats
Il est assez rare que j’achète plusieurs livres en même temps ou sur une courte période. Cette fin d’été a été terrible. A Jersey, j’ai dégoté deux romans de Ian McEwan dont je souhaite découvrir toute la bibliographie, The children act et My purple scented novel. Sur place, j’ai également choisi Eleanor Oliphant is completely fine de Gail Honeyman qui semble prometteur. Quelques titres de la rentrée littéraire sont venus rejoindre mes étagères : En nous beaucoup d’hommesrespirent de Marie-Aude Murail et Avec ma sympathie d’Olivia de Lamberterie. En salon, je me laisse toujours une marge de budget pour craquer sur un ou des livres non prévus. Cette fois, mon dévolu s’est porté sur L’hiver du mécontentement de Thomas B. Reverdy (rentrée littéraire), Beaux rivages de Nina Bouraoui (conseillé par mon amie Kheira) et le premier tome du Chat du Rabbin de Joann Sfar. Enfin, vous ne pourriez la beauté de l’objet-livre de Mrs Dalloway de Virginia Woolf et illustré par Nathalie Novi.
Et vous quel est votre rapport aux auteurs et aux salons littéraires? Des nouveautés dans vos piles à lire?
Résumé de l’éditeur :La vie de Gabrielle Renard est un roman. Un roman vrai et en couleurs qui commence en 1894, quand, toute jeune, elle quitte sa Champagne natale pour devenir bonne à Paris chez les Renoir. Sa beauté simple mais rayonnante lui vaut de poser bientôt pour le célèbre peintre. Également nourrice du petit Jean, le futur cinéaste, elle contribue grandement à son éducation. De cette complicité, de cette tendresse, Renoir saisit sur la toile les instants pleins de grâce. Gabrielle suit la famille au gré de ses pérégrinations et de ses secrets, et côtoie de grands artistes : Manet, Degas… Toujours disponible quand le maître la réclame comme modèle, toujours admirative, de plus en plus experte en art… Ainsi va la vie hors du commun de Gabrielle dans l’intimité de deux artistes majeurs du XXe siècle.
Pierre-Auguste Renoir, peintre impressionniste connu et reconnu, a été maintes fois raconté. Avec son dernier roman, Lyliane Mosca nous introduit dans le cercle Renoir par un biais inédit. En effet, elle nous propose de suivre les pas de Gabrielle Renard. Cette dernière quitte sa campagne champenoise pour entrer au service de la famille du peintre. Elle leur sera fidèle jusqu’à la fin de sa vie. Grâce à son écriture simple et vivante, la romancière nous fait partager le quotidien de tout ce petit monde entre Paris, Essoyes et la Côte d’Azur. C’est le récit d’une relation de confiance et de confidence avec Pierre-Auguste mais aussi de grande complicité avec Jean, l’un des fils et futur cinéaste.
Gabrielle est un personnage assez incroyable. Son naturel, son franc-parler et son authenticité lui attirent les sympathies de tous sauf de la femme de Renoir, Aline. Cette dernière la bat froid à la moindre occasion. Son destin est assez exceptionnel et hors du commun. Elle est domestique, cuisinière, infirmière, nourrice et surtout l’un des modèles fétiches de Pierre-Auguste. Son existence la mènera même à finir ses jours à Los Angeles dans le giron de Jean Renoir. Nous assistons également bien impuissant à l’hiver de la vie de Pierre-Auguste Renoir. La polyarthrite le fait souffrir et limite ses mouvements mais il garde toujours cette envie de peindre et de fixer la lumière et les couleurs sur la toile.
Gabrielle et Jean (1895-1896)
Comme vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé ce roman. Avec simplicité, un certain charme et une tendresse pour ses personnages, Lyliane Mosca nous dévoile le quotidien des Renoir, des anecdotes méconnues mais aussi un très beau portrait de femme au destin étonnant. Je suis ressortie enchantée de cette lecture tout en ayant l’impression d’avoir appris beaucoup. J’ai eu la chance d’interviewer l’écrivaine lors du salon Le livre sur la place à Nancy. La transcription devrait arriver sous peu sur le blog.
Avec un peu de retard, des vacances et du repos bien mérités, je vous retrouve avec un nouveau bilan mensuel de mes lectures. Entre ouvrages graphiques et romans, août m’a permis de découvrir et de redécouvrir des auteurs que j’apprécie particulièrement et qui grimpe dans mon panthéon d’écrivains fétiches. Je pense notamment à Marie-Aude Murail et à Ian McEwan. Quel talent de conteur! Je vous laisse maintenant découvrir les livres qui ont fait mon mois d’août.
Nombre de livres lus : 7
Nombre de pages lues : 2747
(Pour lire les chroniques disponibles, cliquez sur les couvertures)
Les Crèvecoeur, Tome 2 : Romain de Antonia Medeiros, éd. La Bourdonnaye, 280 p.
J’avais parcouru le premier tome il y a des années. Je suis heureuse d’avoir enfin découvert la suite de la saga familiale des Crèvecoeur. Ce tome est profond et déchirant. Nous suivons Germain, petit garçon qui doit composer avec la froideur et les secrets de son père. Il grandit et tente de tracer sa route mais il est bien difficile de se détacher du destin familial.
4/5
Ma vie dans les bois, Tome 1 de Shin Morimura, éd. Akata, 144 p.
Il s’agit d’une découverte tout simplement ébouriffante. Entre détails techniques et situations cocasses, Shin Morimura (mangaka) nous entraine dans son changement de vie. Il décide de construire de ses mains une maison dans les bois, au grand étonnement de son entourage. Un manga original et très intéressant.
5/5
Alchimia, Tome 1 de Samantha Bailly et Miya, éd. Pika, 196 p.
Le premier tome de ce shojo français m’a fait passer un bon moment de lecture. Il cible clairement un public jeune. Je regrette le manque de profondeur. Je me ferais une idée plus précise avec le tome suivant. Toutefois, les personnages et l’univers restent intéressants à découvrir. 3,5/5
Minuscule, Tome 1 de Takuto Kashiki, éd. Komikku, 210 p.
Hakumei et Mikochi sont deux tous petits êtres. Ils vivent au cœur d’une forêt où j’ai suivi leur quotidien avec beaucoup d’intérêt. Les dessins sont superbes et regorgent de détails et d’éléments à observer. Nous assistons à des situations drôles mais aussi à des rencontres hautes en couleur. J’en redemande!
4/5
Sauveur & fils, Saison 1 de Marie-Aude Murail, éd. L’École des loisirs, 368 p.
Cette première saison de Sauveur & fils est le second roman que je lis de Marie-Aude Murail. Je ne regrette pas mon souhait d’approfondir la bibliographie de cette écrivaine car j’ai encore passé un très bon moment. Des sujets difficiles voire tabous sont abordés avec toute la bienveillance et la fantaisie dont fait preuve l’écrivaine.
4/5
Le quatuor d’Alexandrie de Lawrence Durrell, éd. Le Livre de poche, 1053 p.
Cela fait quelques mois que je souhaitais absolument découvrir ce classique de la littérature britannique. Cette fresque est un hommage vibrant à Alexandrie. L’auteur nous dépeint des personnages aux terribles secrets et à l’âme parfois torturée. Les apparences y sont souvent trompeuses. Quelques longueurs alourdissement parfois le récit. Malgré tout, ces dernières n’entachent pas la virtuosité de Lawrence Durell.
4/5
Expiation de Ian McEwan, éd. Folio, 496 p.
Expiation m’a été tellement conseillé que je ne pouvais pas rester plus longtemps sans le lire. Ian McEwan possède un talent dingue pour la description psychologique. Il nous dépeint des personnages forts et charismatiques ainsi que leurs tourments. La chute m’a bouleversée. Une claque!